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Les banques centrales préparent la guerre en achetant de l’or

lundi 8 mai 2023

L’or est une garantie de stabilité économique, les banques centrales détiennent un important stock d’or. En 2020, ce stock représentait 35 000 tonnes qui n’a cessé d’augmenter depuis 2010.
Les banques centrales sécurisent leurs réserves en achetant de l’or, alors que les monnaies comme le dollar et l’euro chutent continuellement.
L’or est une devise reconnue internationalement et toujours très prisée en cas de crise et de guerre.
Cette valeur refuge devra fonctionner quand la crise bancaire éclatera.
Et l’or deviendra un outil efficace face à la chute du dollar comme monnaie de réserve et internationale.
L’or est plus fort que toutes les bombes atomiques réunies.

Pourquoi les banques centrales stockent toujours plus d’or dans leurs coffres

Robert Jules
Les cours de l’or ont gagné près de 20% depuis leur dernier point bas en septembre, soutenus par les achats des banques centrales en 2022 dont le volume est le plus élevé depuis... 1967. Les investisseurs ne sont pas en reste, notamment européens, surtout allemands, préoccupés par le climat inflationniste et les risques géopolitiques. Une tendance qui devrait se poursuivre en 2023.

Les banques centrales et autres fonds souverains ont ainsi acheté 1.136 tonnes d’or (+ 450 tonnes), en net en 2022.

Dans les actifs qui se veulent indépendants de la politique des Etats, l’or physique a eu raison en 2022 de ses concurrents numériques, avec le crash des cryptomonnaies provoqué par la chute de la plateforme FTX de Sam Bankman-Fried. La « relique barbare » comme l’appelait Keynes a discrètement cumulé quelques records l’année dernière.

Les banques centrales et autres fonds souverains ont ainsi acheté 1.136 tonnes d’or (+ 450 tonnes), en net, soit le plus important volume depuis 55 ans. « Les achats pour le seul quatrième trimestre 2022 ont atteint 417 tonnes, portant le total du volume pour le second semestre à plus de 800 tonnes », soulignent les experts du World Gold Council (WGC), dans leur rapport annuel. Si l’on prend en compte l’ensemble de la demande mondiale, elle a augmenté de 18% sur un an pour atteindre 4.741 tonnes, son plus haut niveau depuis 2011.

Mais il n’y a pas que les institutions monétaires qui sont pris de la fièvre de l’or. « La demande des investisseurs a connu une hausse de 10% en 2022, une hausse résultant de deux facteurs, un ralentissement notable dans les ETF et une vigoureuse demande de lingots et pièces d’or », indique le WGC qui note que ce sont les investisseurs européens, notamment allemands, et ceux du Moyen Orient qui ont été les plus gros acheteurs.

Face à cette demande, l’offre mondiale n’a progressé que de 2% en 2022, à 4.755 tonnes. Quant aux volumes extraits des mines aurifères, il a atteint son meilleur niveau depuis 4 ans, à 3.612 tonnes.

Un configuration qui a soutenu les cours. Sur le Comex, le marché des métaux précieux de New York, l’once (31,1 grammes) s’échangeait ce mercredi autour de 1.925 dollars. Ce n’est plus très loin des plus de 2.050 dollars atteint le 8 mars dernier, après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, et c’est pratiquement 20% de hausse depuis son dernier point bas le 23 septembre.

Pour les banques centrales à travers le monde, l’intérêt d’augmenter leurs stocks du métal précieux répond à la montée des incertitudes en 2022, notamment une forte volatilité des marchés financiers et des tensions géopolitiques entraînées par la guerre que mène la Russie en Ukraine depuis le 24 février 2022.

Une couverture contre l’inflation

Une situation qui redonne au métal jaune son rôle traditionnel de valeur refuge et de couverture contre l’inflation sur le long terme. « Il semble que nous entrions dans une nouvelle ère caractérisée par la démondialisation et des structures de pouvoir multipolaires. Le paysage monétaire se caractérise dans le monde entier par une forte hausse des taux d’intérêt, une inflation galopante et des récessions imminentes. Dans cette nouvelle ère, les investisseurs considèrent à nouveau l’or comme une valeur refuge, voire comme un mécanisme de paiement apolitique. L’exemple le plus récent a été l’annonce par le Ghana de son intention d’utiliser l’or plutôt que le dollar américain pour acheter du pétrole. Cependant, la tendance à la dé-dollarisation se répand et s’articule autour de la relation importante et changeante entre les matières premières, l’or et le dollar », explique Ned Naylor-Leyland, analyste chez la société de gestion Jupiter.

En effet, malgré un ralentissement, l’inflation reste élevée. « Il est probable que les banques centrales continueront à resserrer leur politique monétaire pour juguler l’inflation, et la crainte monte dans les principaux pays avancés que cette position restrictive ne fasse basculer l’économie dans une récession », indiquait le FMI dans ses perspectives économiques sur l’économie mondiale publiées cette semaine.

Paradoxalement, ce sont des forces contraires pour l’or. Si l’inflation est favorable à ses achats, en revanche, la hausse des taux lui est défavorable, rendant les rendements obligataires plus attractifs dans les arbitrages de la diversification des portefeuilles des investisseurs d’autant que l’or ne rapporte ni dividende ni coupon. Le métal jaune pourrait profiter donc d’un ralentissement de la hausse des taux. Une indication sera donnée ce mercredi soir avec la première annonce de l’année de la Réserve fédérale. Le consensus du marché tablait sur une progression de 0,25%.

De son côté, le billet vert a également influencé le marché aurifère. Entre fin mai 2021 et fin septembre 2022, il s’était apprécié de quelque 25% par rapport à un panier des principales devises. Un dollar cher pour les détenteurs d’autres devises rend mécaniquement leurs achats d’or plus onéreux. Depuis, il a perdu plus de 10%.

Cette volatilité a d’ailleurs obligé plusieurs pays, notamment les économies émergentes, à vendre des dollars puisés dans leurs réserves de changes pour soutenir leurs monnaies. Une instabilité qui amplifie les incertitudes. « Le principal facteur a été la perte de confiance dans les institutions et les États souverains. La beauté de l’or est qu’il ne nécessite pas de confiance, contrairement aux devises émises par les gouvernements. En raison de sa nature apolitique et de son offre limitée, il a traditionnellement été le choix consensuel d’un monde multipolaire, et c’est là que nous nous dirigeons à nouveau, bien que nous traversions une tempête de volatilité macroéconomique et géopolitique à court terme », philosophe Ned Naylor-Leyland.

Le rallye actuel peut se poursuivre

Les perspectives s’annoncent donc plutôt haussières. « Maintenant que les vents contraires macroéconomiques de 2022 pour l’or deviennent favorables au métal précieux : affaiblissement du dollar américain, pic de l’inflation américaine ouvrant la voie à une politique monétaire américaine modérée et à des rendements du Trésor américain plus faibles, le rallye actuel de l’or peut encore se poursuivre », assure Nitesh Shah, analyste matières premières chez Wisdom Tree.

Toutefois, les banques centrales devraient se montrer moins acheteuses, du moins leurs achats ne devraient pas atteindre le niveau de ceux de 2022. Nombre de pays ont vu s’affaiblir leurs réserves de change, limitant leur capacité d’achat de métal jaune. Mais, prudents, les experts du WGC jugent que « les déclarations tardives (de leurs achats d’or) de certaines banques centrales signifient que nos prévisions ont un degré élevé d’incertitudes ». La « relique barbare » pourrait donc encore réserver quelques surprises en 2023.

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