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Brexit et jacobinisme libéral

Léon Camus

dimanche 3 juillet 2016

In vino veritas. Il s’agit ici du vin de la colère que ne savent plus contenir les altruistes professionnels grands prédateurs devant l’Éternel, de profonds ennemis du genre humain. Rien de tel que les lendemains de fête. Alors que les Européistes pavoisaient donnant leur camp à tout coup gagnant [1] , la rage de la déception leur fait perdre la tête et montrer leur vrai visage. Ceux qui vouent une haine viscérale au peuple souverain sous couvert de cette « Démocratie » qui leur dégouline, épaisse, sur le menton. Effondré de rage, convulsif, Cohn-Bendit, l’acolyte de cet autre diable de Martin Schulz, président du Parlement européen, déverse sa bile en direct sur les écrans, déclarant pathétique « avoir reçu des coups de téléphone de jeunes de Londres, ils étaient en larmes. Parce que les jeunes, leur avenir, c’était l’Europe. Ils ont voté massivement pour l’Europe. Et ce sont les vieux qui ont décidé, le passé a décidé de l’avenir » [2]. Bref, finalement c’est la faute aux vieux et… à Poutine. Fascinant cette haine sui generis pour la Russie orthodoxe dont les oncles et les cousines du rouquin sur le retour avaient su s’emparer en 1917 et y pratiquer le génocide extensif des élites.

Retirons le droit de vote aux ringards

Sorti du même tonneau que Cohn-Bendit, le jeune Gaspard Koenig tombé de la dernière averse, twitte pour sa part : « Je hais les nations, épiphénomène sanglant de l’histoire humaine, et méprise les nationalistes » [3]. Quel cri du cœur et quel aveu. Ce brillant jeune homme au parcours exemplaire – il appartient à cette catégorie d’individus à la trajectoire fulgurante, si fulgurante qu’il est difficile de n’y pas voir la marque des « réseaux » – qui jusqu’en juin 2009 écrivait les discours de la ministre Christine Lagarde. Ceci avant de se délocaliser à Londres et de se faire parachuter à la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD). En 2013, il démissionne et crée la boîte à idée (think tank) « GenerationLibre » qu’il préside depuis. Le 24, au-dessus de l’Atlantique, ce cosmopolite, ce « jacobin libéral » comme il se présente apprend la catastrophe, là n’en pouvant plus, il se lâche : « Ce référendum a fait ressurgir l’autre Angleterre, celle des hooligans et des Little Englanders. Cela semble méprisan t ? Oui. Je hais les nations, épiphénomène sanglant de l’histoire humaine, et méprise les nationalistes. La souveraineté nationale, c’est un os à ronger lorsqu’on a perdu la seule souveraineté qui compte, celle de soi-même… Qui a voté pour rester dans l’Europe ? L’Irlande du Nord, l’Écosse, Londres. Et les jeunes (de manière écrasante : 75% des 18-24 ans, et la majorité des moins de 50 ans ».

Le jeune sieur Koenig à l’instar de son aîné Cohn-Bendit fait dans le jeunisme caricatural. Par définition les vieux sont des cons qui n’ont plus leur mot à dire. C’est l’Angleterre ringarde qui a voté. Ce sont ces vieux, que M. Attali préconise, « parce qu’il est socialiste » (sic), d’euthanasier, qui ont voté en masse pour le Brexit. Or, ces plus de cinquante ans qui votent en masse (trop ?), à défaut de leur offrir l’ultime exit « dans la dignité », peut-être faudrait-il leur interdire de voter, non ? Finalement Koenig annonce la couleur « une pétition circule déjà en ligne pour faire de Londres un État autonome ! Après tout, plutôt que de partir, pourquoi ne pas nous approprier Londres ? ». Oui pourquoi pas ? Il suffira d’étendre les privilèges déjà exorbitants de la Cité, État dans l’État et paradis fiscal qui ne dit pas son nom. En tout cas ce jeune membre de la Jet set, est un archaïque qui s’ignore. Parler comme il le fait de « tradition jacobiniste libérale » montre que cet agrégé de philosophie est un âne, bâté qui plus est. Qu’il se renseigne sur ce que furent réellement le Jacobins - et pas seulement à travers les clichés de nos pédants pédagos – à savoir des monstres assoiffés de sang et d’abstractions. Des coupeurs de têtes qui n’auraient rien eu à envier aux takfiristes de l’État islamique.

La nation c’est la mort, abolissons les frontières et la propriété privée

D’ailleurs et de toute évidence le petit Koenig, lorsqu’il déclare, bis repetita placent, « Je hais les nations, épiphénomène sanglant de l’histoire humaine, et méprise les nationalistes » puise son inspiration à bonne source, celle de Jean-Jacques qui peu ou prou fut l’inspirateur de tous les nihilismes modernes. Ceux qui comme les marxistes-léninistes rêvaient, le fusil et la baïonnette à la main, d’un retour à un soi-disant âge d’or originel tel que rêvé par les nostalgiques de la promiscuité primitive et du cannibalisme endogène [4]. Rousseau n’aimait pas la propriété privée, les murs, les bornes, les limites. Dans les « Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes » (1755, premières lignes de la Seconde partie), Rousseau pose les fondements de sa philosophie, celle apparemment du jeune Koenig… « Le premier qui, ayant enclos un terrain, s’avisa de dire : Ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile (la citation, tronquée, de Wikipedia s’arrête ici, omettant la suite, dans un but qu’évident de désinformation). Que de crimes, de guerres, de meurtres, que de misères et d’horreurs n’eût point épargnés au genre humain celui qui, arrachant les pieux ou comblant le fossé, eût crié à ses semblables : Gardez-vous d’écouter cet imposteur ; vous êtes perdus, si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre n’est à personne ». La terre n’est peut-être à personne, mais ceux qui la cultivent acquièrent de ce fait des droits, à commencer par celui de préserver le fruit de leur labeur contre tout intrus, qu’il soit lapin, limace ou brigand, autrement afin que de facto il ne soit l’objet de toutes les convoitises spoliatrices.

M. Koenig, digne suiveur de Jean-Jacques ne veut pas de frontières pour préserver le pré carré des communautés organiques, pas de nation, il ne veut pas que les peuples se déclarent maîtres chez eux. Koenig trépignant sur son siège de première classe au-dessus de l’Atlantique, veut l’Europe, celle de Bruxelles, sans frontières, une Europe passoire où entre et sort qui veut. Sans montrer patte blanche. En un mot une Europe qui n’existe pas, un faux-semblant, un oxymore, puisqu’elle ne possède ni identité, ni unité, qu’elle n’est qu’un vaste conglomérat d’individus, le réceptacle de toutes les misères et de toute l’écume du monde. Oui da ! Mais dans ces conditions qui paiera les « aides » ? Les contributions ? Et si l’on fait du vrai libéralisme, du chacun pour soi et le diable pour tous, ce sera immanquablement la guerre. Nous en sentons aujourd’hui les prémices… Mais la faute à qui ? Aux populismes, aux droites extrêmes et non aux vagues migratoires invasives accueillies et encouragées sous prétexte que la maison Europe de ne doive pas trop sentir le renfermé. Soyons ouvert, la gueule béante !

Le vrai, le seul danger, le populisme d’ultra-droite

Cette prophétie auto-réalisable n’est pas un banal phantasme de complotiste invétéré, mais la doctrine officielle des Services de sécurité intérieure hexagonaux. Devant les élus de la commission d’enquête parlementaire sur les attentats du 13 novembre, le chef de la DGSI, Patrick Calvar, sans peur du ridicule, avertissait : « Nous sommes au bord d’une guerre civile » en désignant les fauteurs potentiels, non pas les terroristes, les violeurs et les voleurs accueillis à bras ouverts sous couvert d’humanitarisme compassionnel, mais l’ultra-droite… « Les extrémismes montent partout et nous sommes, nous, Services intérieurs, en train de déplacer des ressources pour nous intéresser à l’ultra-droite qui n’attend que la confrontation… Je pense qu’elle va avoir lieu. Encore un ou deux attentats et elle adviendra. Il nous appartient donc d’anticiper et de bloquer tous ces groupes qui voudraient, à un moment ou à un autre, déclencher des affrontements intercommunautaires ». Il ne viendrait pas à l’esprit de ce brillant fonctionnaire que mieux vaudrait éteindre l’incendie en son foyer d’origine… à savoir notre politique démente en Syrie où nous soutenons Al-Qaïda (al-Nosra), l’invasion des fonds qataris et leur financement de mosquées salafo-wahhabites dans nos banlieues, la tolérance sur notre territoire de 10 000 fiches S dont le passage à l’acte individuel est chaque jour à redouter, et cætera.

Qui ne sait en effet que la droite « prête à tout » est une légende toujours utile surtout lorsqu’il s’agit de tétaniser les foules à l’occasion de certaines échéances électorales ? De qui se moque donc ce haut fonctionnaire ? Quelles lunettes a-t-il chaussées pour ne pas voir les sept centaines de casseurs qui accompagnent régulièrement depuis des mois chaque manifestation de la gauche pacifiste mais néanmoins dépaveuse de rue pour en découdre avec les forces de l’ordre ? Ces déprédateurs sont-ils de l’ultra-droite ou de la gauche, extrême, anarcho-trotskiste qui attend depuis un siècle le Grand soir de la Terreur rouge ?

À ce titre nous soupçonnons nos édiles d’être aveuglés par l’onchocercose des fleuves idéologiques qui nous inondent à chaque crue séculaire. Cécité des rivières pourpres qui fait prendre fait et cause à des bourgeoisies masochistes et corrompues, pour les révolutionnaires, terroristes en puissance. Des nobles âmes beaucoup plus souvent animées par le goût du brigandage, la fringale crapuleuse et la rapine que par de nobles, mais mortifères idéaux [5] . Nous devrions repasser la leçon d’histoire que nous ont enseignés les années d’horreur qui précédèrent et suivirent la Révolution bolchevique. Tout une littérature désormais classique que ne devraient pas ignorer ceux qui s’arrogent le droit de parler en notre nom et d’assurer les plus hautes fonctions d’autorité.

Notes

[1Un sondage YouGov publié jeudi soir à la fermeture des bureaux de vote sur la chaîne Sky News, donnait le camp du maintien en tête du référendum. Le camp du “In” l’emportait avec 52% des voix contre 48% pour le camp du “Out”. En sept. 2014, lors du référendum d’autodétermination de l’Écosse, l’institut YouGov avait donné une estimation proche du résultat en créditant les partisans du maintien dans le Royaume-Uni de 54% des voix, 55,3% au final. Dans le même ordre d’idée l’histrion littéraire BHL twittait le 23 juin « Défaite probable du Brexit. Déroute, donc, des souverainistes, des xénophobes et des racistes. Reste maintenant à refonder l’Europe ». Hélas nul n’est plus prophète en Europie.

[2francetvinfo.fr24juin16

[3lefigaro.fr24juin16

[4Pour qui continuerait à croire au « bon sauvage » et à l’innocence des Tropiques, une enquête de Carl Hoffman « Le Destin Funeste de Michael C. Rockefeller », fils de Nelson Rockefeller, petit-fils de John D. Rockefeller Jr. nous ramène opportunément au sens des réalités. Le richissime Michael Rockefeller qui s’est entiché d’art primitif, disparaît en 1961 quelque part en Nouvelle-Guinée sur le territoire des Asmat, d’honorables chasseurs cannibales qui remplacent les matchs de l’Euro par des visites impromptues dans les tribus garde-manger du voisinage.
http://www.vanityfair.fr/culture/li...

[5Terrorisme, banditisme et révolutionnarisme : des frontières indistinctes… On peut lire l’ouvrage de l’israélo-russo-américaine, Anna Geifman, « La Mort sera votre Dieu : du nihilisme russe au terrorisme islamiste ». L’on y verra à quel point la période actuelle présente de similarités avec les Années 1900 en Russie tsariste balayée jusqu’en 1910 par des vagues successives d’abjecte terreur révolutionnaire. De Netchaïev à Ben Laden, en passant par Lénine, Trotski, Dzerjinski, du totalitarisme judéobolchévique à la révolution islamiste, telle est la quintessence de ce nihilisme contemporain qui entend toujours et encore s’imposer comme religion nouvelle de l’humanité.

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