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Général Mandon : « Ce n’est pas à la Commission européenne de définir le besoin militaire ! »

vendredi 21 novembre 2025

En vertu des traités en vigueur, la Commission européenne peut mener une « politique de sécurité et de défense commune » [PSDC] et prendre des initiatives pour encourager la mutualisation des capacités militaires au sein de l’Union européenne [ce qu’elle fait avec les dispositifs SAFE, EDIP, FED, etc.]. En revanche, elle n’a pas à se substituer aux États membres pour tout ce qui a trait à la défense.

NB : Les fous de guerre européens vont se dévorer entre eux pour déterminer qui est le plus dingue pour aller affronter Poutine en premier.

Or, depuis le début de la guerre en Ukraine, et avec la création d’un poste de commissaire à la Défense et l’Espace [confié à l’ancien Premier ministre lituanien Andrius Kubilius], la Commission européenne tend à s’arroger des compétences dans le domaine militaire qu’elle n’est pas censée exercer.

Le dernier exemple en date est le « mur antidrone », que la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, entend promouvoir pour protéger le flanc oriental de l’UE contre la menace des drones russes.

« L’Europe doit apporter une réponse forte et unie aux incursions de drones russes à nos frontières. C’est pourquoi nous proposerons des mesures immédiates pour créer un mur antidrone dans le cadre de l’opération ‘Eastern Flank Watch’. Nous devons agir rapidement, en collaboration avec l’Ukraine et en étroite coordination avec l’Otan », a en effet déclaré Mme von der Leyen, le 30 septembre dernier. Or, selon M. Kubilius, une telle initiative pourrait coûter plusieurs milliards d’euros.

Si certains États membres soutiennent ce projet, d’autres se montrent circonspects. C’est notamment le cas de la France où, ce 18 novembre, le numéro deux de l’armée de l’Air & de l’Espace, le général Dominique Tardif, n’a pas caché son scepticisme, à l’occasion d’un entretien donné au quotidien Le Figaro.

« Le mur de drones, cela me fait un peu penser à la ligne Maginot. Ce n’est pas avec un mur de drones que l’on va arrêter la volonté russe d’envahir un pays. Ça ne sera pas dissuasif », a-t-il en effet estimé.

Lors de sa première audition au Sénat [*] en tant que chef d’état-major des armées [CEMA], le général Fabien Mandon a non seulement critiqué ce projet de « mur de drones » mais aussi les velléités de la Commission européenne dans le domaine militaire.

« Sur la Commission européenne, je sortirais de mon cadre si je devais faire des commentaires. Cependant, en tant que militaire qui doit construire avec le ministre de la défense une loi de programmation qui garantit un modèle d’armée complet et cohérent, je ne peux pas souscrire à l’idée d’un ‘mur de drones’ », a en effet déclaré le général Mandon.

Et d’insister : « Ce n’est d’ailleurs pas son rôle [à la Commission] que de définir le besoin militaire ».

Mais le général Mandon ne s’en est pas tenu là « L’armée protège une population et lorsqu’un soldat tombe au combat, sa famille se tourne vers les chefs militaires, vers le ministre de la Défense et le président de la République. Pour ces familles, ce n’est pas la Commission européenne qui donne l’ordre d’aller à la guerre, ce n’est pas elle qui a la responsabilité de protéger les citoyens ».

Puis, le CEMA s’est montré encore plus sévère à l’endroit de la Commission. « Le besoin militaire aujourd’hui est de reconstituer nos stocks et non de dépenser tout notre argent dans un mur de drones qui serait saturé en un jour », a-t-il dit. Aussi, a-t-il conclu, « ce dossier me paraît symptomatique d’une tendance à faire primer la communication sur l’action ».

[*] Audition à huis clos du 15 octobre 2025. Le compte rendu vient d’être publié.

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