Jean-Noël Barrot Vote par correspondance
26 novembre 2020
En juin dernier à l’approche du second tour des élections municipales reporté du fait de la situation sanitaire, j’avais déposé une proposition de loi visant à rétablir le vote à distance, par voie postale ou par Internet, je vous en parlais dans ce billet.
Actualité d’outre-Atlantique
Ce mois de novembre, l’Amérique tournait la page Donald Trump : Joe Biden est devenu le 46e Président des États-Unis et Kamala Harris la première femme Vice-Présidente.
Et malgré la crise sanitaire, les citoyens américains se sont massivement exprimés : on estime qu’aux États-Unis, la participation a progressée de 6 points. En France, entre les municipales 2020 et l’édition précédente, elle s’est effondrée de 20 points.
L’une des raisons de ce succès en pleine crise sanitaire, la généralisation du vote par correspondance, dans tous les États. J’ai écrit à ce sujet une tribune dans le JDD, le 8 novembre.
Le 10 novembre, j’interpellais le gouvernement à l’Assemblée nationale : les Français ne doivent pas avoir à choisir entre leur santé et l’expression de leurs droits civiques.
Une pratique efficace contre l’abstention
D’autres grandes démocraties ont su s’adapter à la crise Covid-19, c’est le cas en Allemagne, où le vote postal est utilisé depuis 1957 et a été instauré afin de faciliter le vote des personnes âgées ou handicapées. Lors des élections fédérales de 2017, 28,6 % des votes ont été exprimés par voie postale. Lors des municipales en Bavière (mars 2020), la participation a atteint 58,5%, soit +3,5 points qu’en 2014.
C’est aussi le cas en Suisse, pour la votation du 27 septembre par exemple, où la participation globale a marqué une forte hausse : avec près de 60%, c’est un des chiffres les plus élevés depuis des décennies. Les autorités municipales ont annoncé que le vote par correspondance était passé de 87,7% pour la précédente votation en février, à 93,3%.
Globalement, les études estiment que la généralisation du vote par correspondance impacte positivement la participation, particulièrement chez ceux qui ne votent pas habituellement.
La question de la fraude
Qu’en est-il de la fraude ? C’était d’ailleurs la raison invoquée par l’État pour la suppression du vote postal en France en 1975. À l’époque le système comportait plusieurs failles, mais presque 50 ans plus tard les moyens de contrôle et de sécurisation n’ont jamais été aussi performants.
Aux États-Unis, où le sujet a fait couler beaucoup d’encre, aucun cas de de fraude massive et organisée n’est avéré.
Le 12 novembre 2020, la Cybersecurity & Infrastructure Security Agency (CISA) a déclaré que l’élection 2020 avait été la plus sûre de l’histoire du pays, et qu’il n’y avait aucune preuve de bulletins ayant disparus ou ayant été remplacés.
Aux urnes, Citoyens !
Au-delà du vote par correspondance, une réflexion globale doit être ouverte pour la lutte contre l’abstention.
D’autres adaptation de notre système peuvent-être imaginées : le vote par anticipation a démontré une augmentation de la participation de 0.2 points par jour de vote supplémentaire ; l’assouplissement des exigences d’enregistrement a démontré une augmentation de la participation de 4 à 5 points ainsi qu’un accroissement significatif de l’intérêt politique.
Je lancerai prochainement une consultation citoyenne pour recueillir témoignages et avis, et à laquelle je vous inviterai à participer.
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Vote par correspondance : les députés, méfiants, rejettent une proposition de loi
Une proposition du loi « visant à rétablir le vote par correspondance », présentée par le MoDem, mercredi 26 janvier, a été assez largement rejetée. Les députés ont invoqué un risque accru de fraudes au scrutin, un vote qui pourrait s’exercer sous influence, ou encore la perte de solennité du geste électoral.
L’auteur de la proposition de loi visant à rétablir le vote par correspondance, Jean-Noël Barrot (MoDem), l’avait initialement déposée le 2 juin 2020, juste après les élections municipales qui avaient vu le taux d’abstention exploser, dans un contexte sanitaire qui n’avait guère encouragé les citoyens à se déplacer.
Et pourtant, Jean-Noël Barrot l’a rappelé, le taux de participation avait, à la même période, augmenté lors de scrutins électifs en Allemagne et aux USA, où le vote par correspondance est installé depuis plusieurs années. Rappelons qu’en France, il a existé entre 1946 et 1975, année de son abrogation en raison de fraudes caractérisées. Aujourd’hui, il subsiste en tant qu’exception, pour les détenus et l’élection des députés des Français établis hors de France.
Un remède contre l’abstention ?
Au lendemain des dernières élections régionales et départementales, le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, avait lancé une mission d’information, menée par Stéphane Travert (La République en marche) et Xavier Breton (Les Républicains), afin de lutter contre la baisse de la participation des Français lors des élections. Parmi les 28 préconisations dévoilées en décembre dernier, figurait l’expérimentation du vote par correspondance et du vote par Internet « lors de prochaines élections locales ou de référendums d’initiative locale, dans les communes volontaires. »
Jean-Noël Barrot a repris mot pour mot cette formulation, via un amendement à l’article 1er de sa proposition de loi, qui propose le recours à « une simple expérimentation du vote par correspondance postale lors des élections municipales de 2026 sur une base volontaire ». Une manière, par cette notion d’expérimentation, d’anticiper les éventuelles réticences liées aux contraintes d’ordre logistique et opérationnel.
Ciblant les électeurs « les plus vulnérables », ainsi que les huit millions de citoyens qui n’habitent pas la circonscription dans laquelle ils sont inscrits, le rapporteur a insisté sur le fait que « rien n’obligerait les électeurs à y recourir ».
La majorité divisée
Un argument qui n’a pas suffi à battre le scepticisme des députés, en particulier ceux de La République en marche, alors que le groupe LaREM et le groupe MoDem appartiennent tous les deux à la majorité présidentielle. Thomas Rudigoz (La République en marche), a évoqué le risque accru de « vote sous influence (...) familiale, clientéliste voire communautaire », idée reprise quelques minutes plus tard par Raphaël Schellenberger (Les Républicains).
Cet argument selon lequel l’acte de voter doit reposer sur le vote à l’urne et l’isoloir pour éviter tout vote sous influence, a été jugé « sérieux et légitime », par le rapporteur lui-même. Cependant, celui-ci y a répondu en arguant que « le vote par procuration heurte bien plus frontalement le caractère personnel et secret du vote ».
Quant à l’inquiétude suscitée par le risque de fraude, Jean-Noël Barrot a tenu à rappeler qu’« à l’étranger aucune étude n’a démontré que cette technique de vote n’induirait davantage d’irrégularités ». La députée socialiste Cécile Untermaier, dont le groupe s’est prononcé en faveur de la proposition de loi, a d’ailleurs considéré que « le traumatisme des fraudes au vote postal en 1975 [pesait] injustement lourd ». Elle a cependant voulu souligner que pour lutter contre l’abstention, la nécessité de « simplifier l’inscription sur les listes électorales », constituait une mesure tout aussi importante que celle relative au vote par correspondance.
Erwan Balanant (MoDem) est également venu en renfort de son collègue. Se disant « profondément attaché à la liturgie électorale » constituée par des dimanches précis durant lesquels tous les Français sont invités à se rendre au bureau de vote, les rituels constitués par l’urne et l’isoloir, il a cependant enjoint les députés à « sortir de la nostalgie démocratique, d’un conservatisme qui n’aide pas à l’engagement de nos jeunes ».
Ces arguments n’ayant pas convaincu une majorité de députés au sein de la commission des lois, les articles de la proposition de loi ont été rejetés. Le texte sera débattu dans l’Hémicycle, jeudi 3 février, lors de la journée d’initiative parlementaire réservée au groupe MoDem.