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McKinsey, pilote la transition énergétique de l’Allemagne, et c’est une catastrophe

dimanche 31 octobre 2021

Si ambitieux soit-il, l’objectif que s’est fixé l’Union européenne – atteindre la neutralité carbone à horizon 2050 – apparaît accessible. Cette transition pourrait en outre se réaliser à coût net nul pour la société, et également générer un gain net d’emplois. Toutefois, elle supposerait un effort profond de transformation de l’appareil productif, une étroite coordination entre tous les acteurs socioéconomiques ainsi que des ajustements du cadre d’investissement à l’échelle des 27 Etats membres.Les travaux de recherche de McKinsey1 suggèrent en effet qu’il existe un scénario de transition optimal permettant de concilier la décarbonation de l’Europe et sa prospérité économique.

McKinsey

En 2016, une mission a été confiée à McKinsey pour aider l’Office fédéral allemand des migrations à gérer la crise migratoire. Der Spiegel révèle que ces interventions auraient rapporté plus de 20 millions d’euros au cabinet de conseil depuis octobre 2015. McKinsey a également une mission auprès du groupe de travail pour l’emploi. Une mission facturée 4,96 millions.
McKinsey est un cabinet conseil de la CIA pour arriver à la conformité des règles européennes qui sont celles du groupe Bilderberg et de Davos ( deux émanations de l’agence fédérale américaine CIA)

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La transition énergétique : Selon McKinsey, l´Allemagne aura du mal à atteindre ses objectifs d’ici 2020 et performe comparativement moins bien que d´autres pays européens

Hartmut Lauer

Depuis 2012 McKinsey publie un baromètre semestriel qui analyse la progression de la transition énergétique allemande. Le cabinet s’appuie sur les trois critères du triangle énergétique : la sécurité d’approvisionnement, l’économie et la protection de l’environnement et du climat. Le cabinet évalue 14 indicateurs sous l’angle de leur progression vers les objectifs prévus pour 2020.

Huit des quatorze indicateurs dans le rouge

Le baromètre actuel publié en mars 2018 n’incite pas à l’optimisme (/1/, /2/). Douze indicateurs ont évolué depuis la dernière publication en automne 2017 /3/, seuls cinq empruntent la bonne trajectoire au regard des objectifs fixés pour 2020. Parmi eux figurent l’objectif déjà atteint de 35 % d’énergies renouvelables dans la consommation brute de l´électricité (36,4% en 2017), le nombre d´emplois liés aux renouvelables et à l´industrie électro-intensive, la réduction des coupures de courant non prévues ainsi que la marge de réserve des capacités de production électrique par rapport à la pointe.

Un léger besoin d’adaptation existe pour l´indicateur « capacité d´interconnexions électriques ». Ce critère, nouvellement introduit, évalue la capacité transfrontalière d’échanges nécessaire pour garantir la sécurité de l’alimentation électrique. La Commission Européenne (CE) retient un objectif de capacité d’interconnexions de 10 % pour 2020 et 15 % pour 2030 pour chaque pays rapporté à la capacité électrique installée : celle de l´Allemagne s´élève actuellement à 7%. Elle est en fort recul depuis 2016 compte tenu du développement massif des énergies renouvelables et des flux en boucle, appelés « loop flows » dans les pays voisins pour acheminer du courant du nord au sud de l’Allemagne à cause de la lente modernisation du réseau électrique.

Toutefois, selon McKinsey la réalisation des 8 critères d´ici 2020 serait inatteignable :

- L´objectif national de 40 % de réduction des émissions des gaz à effet de serre d’ici 2020 par rapport à 1990 : l´Allemagne est en 2017 avec 905 Mt CO2 éq. très loin de son objectif de 750 Mt CO2 éq. en 2020. Une cause notable est la baisse insuffisante des émissions des secteurs du bâtiment (chaleur/refroidissement) et du transport.

  • La réduction de la consommation de l´énergie primaire et de l´électricité : une baisse de la consommation de l´énergie primaire de 20% d´ici 2020 par rapport à 2008 est prévue. Avec 13 550 PJ (324 Mtep) en 2017, l´objectif de 11 454 PJ (274 Mtep) en 2020 reste éloigné. De même pour la consommation brute de l´électricité. L´objectif de 553 TWh d´ici 2020 (baisse de 10% par rapport à 2008) est avec 600 TWh en 2017 inatteignable et en hausse par rapport à 2016.
  • Les coûts des interventions des gestionnaires des réseaux allemands relatifs à la stabilisation du réseau : le critère de McKinsey est de ne pas dépasser les coûts de 2008, à savoir 1 € par MWh de l´électricité produite sur la base des énergies fatales (éolien, solaire). Au premier trimestre 2017 les coûts s´élevaient à 13,11 €/MWh.

- Les prix de l’électricité pour les ménages et pour l´industrie : en 2017 les ménages allemands, avec une consommation située entre 2500 kWh et 5000 kWh, ont payé 30,5 ct/kWh contre 20,4 ct/kWh en moyenne dans le reste de l’UE et l’Allemagne est désormais le pays européen, avec le Danemark, où l’électricité est la plus chère. Le prix pour les industries non privilégiées (càd celles qui ne sont pas électro-intensives), pour les sites industriels moyens avec une consommation entre 20 et 70 GWh reste, à 9, 72 ct/kWh, supérieur à la moyenne européenne (8,46 ct/kWh). La fiscalité représente avec 54 % pour les ménages et 45% pour l´industrie la part la plus importante du prix de l électricité en Allemagne.

- Le coût de soutien des énergies renouvelables : la subvention aux énergies renouvelables atteint 6,9 ct/kWh en 2017, alors que l´objectif était de ne pas dépasser 3,5 ct/kWh en 2020. Une légère baisse à 6,79 ct/kWh est prévue pour 2018 mais il faudra attendre 2021 – lorsque les anciennes installations, les plus coûteuses, sortiront de la garantie de subvention après 20 ans – pour observer une baisse significative.

  • La construction à l’horizon 2020 des lignes de transports d’électricité : alors que la valeur cible de McKinsey pour 2020 est de 3582 km, sont construits 879 km (état au 30.09.2017) dont seulement 63 km nouveaux depuis le premier trimestre 2017.

L´Allemagne perd son rôle pionnier dans la transition énergétique

Sur le plan international, l´Allemagne obtient également de moins bons résultats dans les compétences de la transition énergétique selon le nouveau « Energy transition Index 2018 » publié en mars 2018 par le WEF (Forum Economique Mondial) qui classe 114 pays en fonction de la qualité de leur transition énergétique (/2/, /4/) sur la base de 40 indicateurs développés par McKinsey en coopération avec le WEF.

Le bilan de la transition énergétique est évalué dans la catégorie « System Performance » à partir des critères du triangle énergétique sur la base de 17 indicateurs, parmi lesquels :

la durabilité environnementale du système
le potentiel de croissance et de développement économiques
la sécurité énergétique et l’accès à l’énergie

La catégorie « Transition Readiness » utilise 23 indicateurs pour évaluer les conditions générales de chaque pays pour la préparation à la transition énergétique, par ex. institutions, réglementations, investissements, infrastructure énergétique.

L’ensemble des résultats de chaque pays est intégré dans un classement global le « Energy transition Index » permettant une comparaison directe de la performance du système énergétique actuel et du niveau de préparation à la transition énergétique globale de chaque pays.

Le résultat peut paraître surprenant. Le classement est largement dominé par l’Europe du Nord et de l’Ouest (voir figure 1).

Ranking_1
Figure 1 : Energy Transition Index 2018 – Classement des pays selon les catégories principales /2/, /4/, /5/

Le forum économique mondial place l’Allemagne seulement à la 16e position avec un top 10 exclusivement composé de pays européens, au premier rang desquels la Suède, la Norvège et la Suisse. La France se positionne à la 9e place des pays les mieux préparés pour la transition énergétique globale.

Seule une analyse de détail permet de montrer les forces et les faiblesses de la transition énergétique allemande. Dans la catégorie « Transition Readiness » l´Allemagne se place à la 11e position grâce à une bonne préparation et des institutions et réglementations solides.

En revanche, dans la catégorie « System Performance » l´Allemagne se situe à la 44e position donc plutôt en milieu du peloton des pays étudiés. En effet l´Allemagne est confrontée à des défis majeurs concernant la structure du système énergétique. L’électricité allemande reste très dépendante des combustibles fossiles, notamment du charbon actuellement nécessaire pour assurer la sécurité d´approvisionnement suite à la décision de la sortie accélérée du nucléaire. L´Allemagne n´atteindra pas l´objectif principal de la transition énergétique, à savoir la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40% d´ici 2020 et pâtit de prix de l’électricité élevés suite au surfinancement des énergies renouvelables pendant des années.

Le nouveau gouvernement allemand qui a pris ses fonctions mi-mars 2018 doit prendre des mesures pour réengager la transition énergétique sur la voie du succès.
Références

/1/ McKinsey, Energiewendeindex, https://www.mckinsey.de/energiewend...

/2/ Vahlenkamp, Thomas ; Ritzenhofen, Ingmar ; Gersema, Gerke ; Kropeit, Julia : « Energiewende global – Was Deutschland von anderen Ländern lernen kann « , Energiewirtschaftliche Tagesfragen (3/2018), https://www.mckinsey.de/files/et_ma...

/3/ Hurel, Tristan : « Transition énergétique allemande : les indicateurs sont au rouge », SFEN, 10.10.2017, http://www.sfen.org/rgn/transition-...

/4/ World Economic Forum : Fostering Effective Energy Transition – A Fact-Based Framework to Support Decision-Making, Mars 2018, http://www3.weforum.org/docs/WEF_Fo...

/5/ World Economic Forum : « Fostering Effective Energy Transition – Energy Transition Index 2018 », http://www3.weforum.org/docs/WEF_Fo...

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