Faut-il encore parler de l’Ukraine ? Et que dire ? Que la guerre fait rage ? C’est un fait et une évidence. Un état de fait que les journalistes semblent découvrir maintenant, très tard, alors que n’importe qui pouvait le constater depuis des mois… mais pas les grands professionnels de la gens médiatique. Ne glosons donc pas sur les mensonges par omission dont nous sommes silencieusement et quotidiennement abreuvés. Ni sur la bêtise crasse d’une profession engluée dans la paresse intellectuelle et un conformisme pathologique, car tout a déjà été dit sur la question. Grâce au ciel, seuls les « vieux » regardent encore les lucarnes télévisuelles, les jeunes générations préférant de loin, la Toile. Ce qui limite le pouvoir de nuisance de ceux qui, la bouche en cul de poule - tout en roulant des yeux de merlans frits - découvrent midi à dix-neuf heure… ceux-là commencent à serrer les fesses parce que l’orage se rapproche de la Ligne bleu des Vosges, semant la mort au Donbass avec son cortège de cadavres et de misères [1]. Ici également l’on risque de récolter ce que nous avons semé pour avoir écouté ces prophètes de malheur, experts dans l’art de faire se battre les montagnes qui, tels Alexandre Adler [2], prêchent une haine atavique, mais feutrée, à l’égard de la Russie et de ses dirigeants… des gens qui sèment l’éternelle zizanie et soufflent inlassablement sur les braises. Images qui ne sont pas rhétoriques mais s’actualisent ici et maintenant à l’Est de l’Ukraine, aux marches de la Russie et de l’Europe, sous forme de ruines fumantes… et de corps disloqués aux membres arrachés jonchant les rues.
Pendant l’entracte, la guerre se poursuit
En tout cas les préparatifs de conflit se poursuivent. Kiev a décrété la mobilisation de 100 000 hommes de 18 à 45 ans. Environ 78 000 sont déjà sous les drapeaux et 46 000 sont en route vers le Donbass. Reste que les désertions flambent… comme en Transcarpathie où 80 % des appelés ne se présenteraient pas aux commissions d’incorporation. Aussi les procédures se multiplient-elles contre ceux, toujours plus nombreux, qui osent dire « Je ne suis pas Charlie » et franchissent les frontières russes, polonaises ou roumaines.
Simultanément l’Otan, c’est-à-dire le Pentagone, n’exclut pas le recours à la force… pour ramener la paix dans le Donbass… « L’Occident ne doit pas exclure la possibilité d’un règlement militaire du conflit en Ukraine » nous a averti le général Breedlove, alias docteur Folamour et commandant en chef des forces de l’Otan en Europe. C’était à Munich, le 7 février à l’occasion de la 45e Conférence sur la sécurité collective [3]. Une conférence qui a réuni treize chefs d’État et une cinquantaine de ministres supposés établir les voies et moyens utiles à prévenir la « destruction de l’ordre mondial actuel »… notamment eu égard à la guerre de l’Est de l’Ukraine et de l’expansion de l’État islamique en Irak et en Syrie.
Washington n’a cure des négociations cosmétiques
Prudent cependant, le Dr. Breedlove tint à nous prévenir que l’Alliance ne s’engagerait en aucun cas dans une « opération au sol ». Oui da, car pour ce faire encore faut-il disposer d’effectifs, ce qui n’est pas le cas de l’Otan… qui au mieux pourrait disposer de 25 000 hommes et seulement 5 000 dans une conjoncture d’urgence. Une indigence qui n’est pas forcément rassurante pour autant. Parce nous ne sommes définitivement plus dans le cas de figure d’une guerre aérienne à outrance comme en 1999 contre la Serbie (Fédération yougoslave). Les appareils et les missiles de croisière de l’Otan doivent s’attendre à franchir un redoutable barrage de S-300 PMU2 sol-air volant à mach 6,5… Et pourquoi avant d’essuyer des tirs antiforces au moyen de vecteurs sol-sol Iskander (Alexandre), également hypervéloces (Mac 7) et porteurs, le cas échéant, de têtes nucléaires tactiques. Ceci n’étant pas tout à fait une hypothèse d’école sachant que le proconsul Breedlove a qualifié de « complètement inacceptable » le plan avancé par le président Poutine pour le règlement du conflit de l’Est de l’Ukraine [4]. Autant dire que les bons offices du duo Merkel-Hollande sont considérés Outre-Atlantique comme nuls et non avenus.
Cette déclaration du commandant en chef des forces alliées en Europe constitue de la part de Washington une sorte de fin de non-recevoir a priori quant aux résultats de la rencontre tripartite, Russie, Allemagne, France, du vendredi 16 février au Kremlin [5]
. Plan qui pourtant, en principe, doit être avalisé le 10 février par les quatre parties concernées : Ukraine, Russie, Allemagne, France. Faut-il en conclure que la négociation « de la dernière chance » n’était destinée qu’à donner le change ? Qu’au mieux elle permettra à Kiev de restructurer son dispositif et de se réarmer grâce aux euratlantiste ? Le ministre des Affaires du Royaume-Uni ne vient-il pas de qualifier le président russe de « tyran ». Or, que fait-on avec les tyrans ? On les abat !
Ce pourquoi, mis au parfum des intentions réelles des maîtres du jeu, le sieur Hollande, aussi inconscient que fier-à-bras, s’est autorisé à déclarer le lendemain des pourparlers de Moscou, le 7 février à Tulle, que ces échanges constituaient l’une des dernières chances d’éviter la guerre. « Je pense que c’est une des dernières chances… Si nous ne parvenons pas à trouver, non pas un compromis, mais un accord durable de paix, eh bien nous connaissons parfaitement le scénario : il a un nom, il s’appelle la guerre ».
Les jeux sont faits
Au demeurant que demande M. Poutine pour fermer sa frontière aux matériels et aux hommes qui, à titre individuels, viennent au secours du Donbass assiégé par les troupes gouvernementales ? L’assurance que l’Ukraine ne rejoindra pas l’Otan. Que cette « Marche » au sens étymologique du nom « Ukraine », restera neutre comme le fut la Finlande au cours de la Guerre Froide. Le terme en resté depuis : finlandisation, terme inventé par le ministre autrichien Kar Gruber en 1953. Un gel [6] des positions qui eut dû accompagner la dissolution unilatérale du Pacte de Varsovie intervenue à Prague le 1er juillet 1991. En outre, le président Russe veut la levée des sanctions qui épuisent son économie et font fuir investisseurs et capitaux. Est-ce la mer à boire ? Non, mais M. Hollande n’est pas un homme libre. Pas plus que Mme Merkel. Les intérêts que lui et Frau Kartoffel défendent ne sont pas de chez nous, ce ne sont pas ceux du Vieux Monde ni ceux de la stabilité internationale. Les rives de Manhattan sont loin et les vétérotestamentaires judéo-protestants n’ont pas connu les désastres de la guerre depuis Lincoln. Donc peu leur chaut que l’Europe puisse à nouveau devenir, potentiellement, le « champ de bataille » où l’Est et l’Ouest mesurerons leurs forces et leur détermination.
Hollande bafouille mais veut passer à la postérité
M. Hollande radote. Mais croit mordicus qu’il restera dans l’histoire comme l’homme du 11 Janvier et celui qui aura tout tenté pour éviter une nouvelle conflagration européenne. Car cela fait au moins six semaines qu’il nous parle bonnassement, sur le ton de la bagatelle, des guerres imminentes, guerre avec Damas sous couvert d’éreinter l’État islamique, guerre ouverte avec la Russie souverainiste et orthodoxe sans complexe, alliée de Damas. Sombres perspectives qui ne semblent pas vraiment l’émouvoir ni le concerner, comme s’il était un simple spectateur mais pas plus que ça. Comme s’il s’agissait d’une fatale fatalité. Il est vrai qu’il ne s’agit que du sang des autres. Le sang de tous ceux des deux bords qui sont voués au sacrifice pour que triomphe l’idéologie euratlantiste du libre marché, de l’endettement universel… la dette des personnes et des États, forme moderne du servage sans limites temporelles ni frontières physique. Servitude par la dette que le christianisme et l’islam avaient bannie. Raison pour laquelle le Meilleur des mondes d’iniquité ne peut se bâtir que sur les décombres des grandes religions, ces « idolâtries » ennemies de ce Molochisme moderne qu’est le monothéisme du Marché [7]. Gardons toujours à l’esprit cette ordonnance du « dieu des batailles » : « Les dieux des autres peuples sont des fantômes, des idoles et des démons » [8]…« Aux serviteurs des idoles, il faut livrer une guerre d’extermination » [9].
Léon Camus 7 février 2015