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Adrian Salbuchi - Explications sur la crise financière mondiale

mardi 29 octobre 2013

Adrian Salbuchi est un écrivain, économiste, fondateur du Mouvement pour la Seconde République argentine.
Il propose dans cette vidéo une analyse sur la crise économique et l’imposture de la finance et des banques envers l’économie réelle.
Selon lui il ne faut plus faire confiance au système bancaire et investir dans des biens durables ou des métaux précieux. Cette crise systémique va détruire l’économie mondiale parce que le modèle économique est basé sur une « chaîne de Ponzi » une sorte de « trompe couillon » qui ne profite qu’aux élites et crée de la pauvreté de masse.
L’initiateur de notre nouvelle économie fut Charles Ponzi escroc italo-américain fondateur de The Securities Exchange Company plus connu sous le sigle SEC http://www.sec.gov/

Chaîne de Ponzi

Charles Ponzi, maître à rouler de Madoff

Bernard Madoff, auteur d’une escroquerie monumentale à 65 milliards de dollars (45 milliards d’euros), savait très bien qui était Charles Ponzi. Quand la police de New York est venue l’arrêter en novembre 2008, il a avoué spontanément « avoir monté une chaîne de Ponzi ».

Ce vol très simple qui consiste à payer Pierre avec l’argent de Paul – en prélevant sa dîme au passage – porte des noms divers : « chaîne de Ponzi », « dynamique de Ponzi », « pyramide de Ponzi », ou « schéma de Ponzi »… La dénomination varie, mais la paternité revient toujours et immanquablement à Carlo K. Ponzi, alias Charles Ponzi, né à Parme (Italie) en 1882.

Ce maître escroc met le pied pour la première fois à New York en 1903, à l’âge de 21 ans. Comme tous les Européens venus refaire leur vie dans le Nouveau Monde, il est pauvre. « J’avais en tout et pour tout deux dollars et demi en poche, mais un million de dollars d’espoir dans le cœur. Cet espoir ne m’a jamais quitté », dira-t-il à un journaliste du New York Times à l’été 1920.

Selon Mitchell Zuckoff, l’un de ses biographes, Charles Ponzi parlait avec les mains et ses manières frustes révélaient qu’il n’était pas passé par les bonnes écoles. Mais il avait l’esprit agile et, pour échapper à la misère, mille et une martingales échauffaient son esprit en permanence. Comme Bernard Madoff, issu lui aussi d’un milieu modeste, « il avait son nez pressé contre la vitre. Il ne faisait pas partie du gratin de Wall Street, mais il rêvait de côtoyer Rockefeller », écrit Mitchell Zuckoff.

LES PREMIÈRES FRAUDES

Charles Ponzi passe les quatorze premières années de sa vie américaine à voyager de ville en ville, exerçant divers métiers : garçon d’hôtel, serveur, vendeur, plongeur dans un restaurant, traducteur… En 1909, au Canada, il est mêlé à la faillite frauduleuse d’une banque montée par un compatriote italien. Arrêté, convaincu d’avoir émis de faux chèques, il est condamné à trois ans de détention au pénitencier de Saint-Vincent-de-Paul à Montréal.

Relâché le 30 juillet 1910, après moins de deux ans, pour bonne conduite, Ponzi revient aux Etats-Unis. Dix jours après sa sortie, il est arrêté à nouveau pour avoir tenté d’introduire illégalement cinq Italiens sans papiers aux Etats-Unis. Il retourne en prison jusqu’en 1912.

Quand il ressort, son désir de devenir riche ne l’a pas quitté. En 1917, Charles Ponzi arrive à Boston. Il tombe amoureux de Rose Guecco, dactylo, fille d’un grossiste en fruits et légumes. Il l’épouse. « La plus belle femme du monde. Tout ce que je fais dans l’existence, c’est pour elle. Elle n’est pas seulement mon bras droit, mais aussi mon cœur », déclare-t-il au New York Times le 29 juillet 1920.

En 1919, Ponzi cherche des fonds pour lancer divers projets, dont un magazine consacré à l’export. A l’occasion d’une correspondance avec l’étranger, il découvre à l’intérieur d’une lettre en provenance d’Espagne un coupon-réponse international (CRI). Il remarque que ce coupon a été payé en pesetas l’équivalent de 1 cent américain. Nonobstant cet écart de change, il peut être échangé dans une poste de Boston contre un timbre valant 6 cents.

Face à cet écart de valeur, la machine à rêves de Charles Ponzi redémarre. Il compulse les journaux financiers, compare jour après jours la rubrique des changes. Si un timbre acheté 1 cent en Espagne ou en France peut être échangé contre un timbre à 6 cents aux Etats-Unis, alors il suffit d’investir un million là-bas pour obtenir 6 millions ici. Dix millions là-bas, pour 60 millions ici. 100 millions…

Pour comprendre la mécanique Ponzi, il faut opérer un détour par le système postal international. Au début du XXe siècle, l’Europe se vide de ses habitants. Allemands, Italiens, Anglais… partent tenter leur chance dans le Nouveau Monde. Pour faciliter les échanges entre les familles morcelées et pour compenser les inégalités de revenus entre ceux qui partent et ceux qui restent, l’Union postale internationale invente, en 1907, le coupon-réponse international, une sorte de timbre-poste universel.

Un particulier qui écrit à sa famille trop pauvre pour lui répondre peut inclure dans l’enveloppe un CRI. Le destinataire se saisit du coupon et va l’échanger dans le premier bureau de poste contre un timbre. Comme à cette époque les monnaies étaient stables et les variations de change imperceptibles, le système pouvait fonctionner sans à-coups. Mais à la fin de 1919, quand Charles Ponzi découvre le CRI, l’Europe est en proie au chaos économique. La première guerre mondiale a été financée par la planche à billets, l’inflation galope, les dévaluations s’enchaînent et les institutions postales dans chaque pays d’Europe peinent à réajuster en permanence leurs tarifs sur une monnaie dont la valeur fond mois après mois.

C’est sur ces écarts de change que Ponzi imagine de bâtir une fortune. Telle est l’histoire qu’il racontera au New York Times le 30 juillet 1920. « J’ai commencé par observer les taux de change dans les différents pays européens. J’ai testé l’affaire pour mon propre compte. Pour voir. ça marchait. Mes premiers 1 000 dollars sont devenus 15 000. »

Les journalistes les plus perspicaces lui demandèrent néanmoins par quel mécanisme il transformait les timbres en argent. Et là Ponzi souriait finement. « Vanderbilt, Pierpont Morgan ne révélaient leurs trucs à personne », affirmait-il. Bernard Madoff non plus, quand les questions devenaient trop précises, se retranchait derrière le secret des affaires.

Le 26 décembre 1919, au lendemain de Noël, Charles Ponzi est le fondateur, le principal actionnaire et le seul employé de The Securities Exchange Company. La société a pignon sur School Street, au cœur de Boston, mais le premier mois de loyer de cette boutique et ses meubles d’occasion sont le fruit d’un emprunt de quelques centaines de dollars. Ses premiers visiteurs ne sont pas des clients. Un représentant de la chambre de commerce de Boston vient auditer le projet professionnel et commercial de Charles Ponzi. Il n’y trouve rien à redire. Un inspecteur des Postes émet, lui, quelques doutes sur la légalité du procédé. Charles Ponzi répliqua que l’administration postale américaine n’a rien à y voir puisque la transformation du coupon en argent s’opérera à l’étranger. L’inspecteur des Postes repart sceptique. Ponzi a imprimé de jolis certificats de couleur à en-tête de la Securities Exchange Company. Chaque certificat précise le montant investi (50, 100, 1 000 dollars…), l’intérêt de 50 % (75, 150, 1 500 dollars...) et le délai de quatre-vingt-dix jours avant le paiement du principal et des intérêts. Seuls le nom du déposant et la date sont laissés en blanc. Au début, les couleurs changeaient en fonction du montant, mais en mars 1920, tous les certificats deviennent jaunes.

La rumeur que Charles Ponzi paye 50 % d’intérêts après trois mois se répand dans Boston comme une traînée de poudre. En janvier 1920, Charles Ponzi reçoit lui-même les clients, encaisse leur argent, tamponne les coupons et les signe. Mais dès le mois de février, quatre employées embauchées rapidement suffisent à peine à répondre à la demande. Au mois de mars, School Street donne le spectacle d’une émeute quotidienne. Lucy Meli, fraîche émoulue d’une école de commerce, est embauchée pour organiser l’entreprise. Elle a sous sa coupe jusqu’à trente salariés. Début juillet 1920, 30 000 personnes au moins avaient voulu profiter de la martingale de Ponzi et lui avaient confié plus de 10 millions de dollars. En juillet 1920, Ponzi encaissait encore un million de dollars par semaine. Par comparaison, un professeur à l’époque gagnait à peine 350 dollars par mois. Lorsque le système s’effondra, il avait fait circuler plus de 15 millions de dollars, une somme astronomique pour l’époque.


LE RÊVE AMÉRICAIN

Charmeur, charmant, Charles Ponzi soignait son image. Il portait un costume sur mesure, un chapeau, des gants et balançait une canne à pommeau doré. Il peaufina son personnage en achetant une maison de près de vingt pièces à Lexington, dans la banlieue de Boston. Il s’inventa aussi une légende. A un journaliste du Boston Globe, il raconta être né dans une famille de la bonne bourgeoisie italienne. « Je vais être franc avec vous, j’étais ce qu’on appelle un fils prodigue. Dépenser de l’argent me paraissait la chose la plus intéressante à faire sur terre. »

Charles Ponzi évita le piège de la philanthropie : il ristournait un intérêt astronomique de 50 % en trois mois, parce qu’il engrangeait pour lui-même des bénéfices de 400 %. Et il ne s’en cachait pas. Le New York Times le crédita d’une fortune estimée à 8 millions de dollars en juillet 1920. Pour tous, il était celui qui avait trouvé la faille dans le mur de l’argent. Il incarnait le rêve américain.

Des jaloux tentèrent d’ouvrir des boutiques concurrentes dans School Street. Des aigrefins imprimèrent de faux reçus de la Securities Exchange Company. Des chefs d’entreprise se plaignirent ouvertement de voir leurs salariés quitter leur travail pour apporter leurs économies à Charles Ponzi. Les banquiers de Boston surtout s’énervaient de voir leurs caisses se vider au profit d’un va-nu-pieds italien. La presse enfin s’en mêla : Clarence Barron, célèbre analyste financier, fit remarquer dans The Boston Post que 27 000 coupons postaux seulement étaient en circulation aux Etats-Unis alors qu’il en aurait fallu 160 millions pour correspondre aux encours affichés par Ponzi.

Un début de panique s’installa. Ponzi remboursa deux millions de dollars en deux jours, mais il avait du bagout et réussit à calmer le jeu. En ce 26 juillet 1920, Ponzi encaissait encore 200 000 dollars par jour. Le procureur Joseph C. Pelletier demanda à Ponzi de cesser de recruter de nouveaux clients, le temps qu’un audit validât ses opérations. Ponzi accepta. Des centaines d’épargnants frustrés furent éconduits.

Ponzi comprit-il à cet instant que son système de redistribution touchait à sa fin ? Sans doute pas. Si l’on en croit Donald Dunn, un autre de ses biographes, il réfléchissait néanmoins à une porte de sortie : il voulait ouvrir des bureaux dans toutes les grandes villes des Etats-Unis, ponctionner des centaines de millions de dollars pour investir dans l’économie réelle. Il aurait alors transformé cette énorme dette en actions de sociétés ayant pignon sur rue.


LA CHUTE

Mais le temps lui manqua. Le Boston Post révéla début août que Charles Ponzi avait fait de la prison. La panique recommença. Au même moment, le patron de la commission bancaire du Massachusetts, Joseph Allen, se mit à craindre pour le système bancaire de l’Etat : les retraits massifs organisés par Ponzi pour rembourser les épargnants risquaient de mettre les banques à genoux. Il ordonna à la Hannover Trust de refuser d’honorer les chèques de Charles Ponzi. Les autres banques suivirent. A la mi-août, l’escroquerie éclata dans toute son ampleur. Charles Ponzi fut incarcéré.

Quand un juge lui demanda : « Votre seul travail était-il d’encaisser de l’argent, d’émettre un reçu et de redistribuer ce même argent trois mois plus tard avec un intérêt ? » Charles Ponzi répondit simplement : « Oui. » Il fut condamné à cinq ans de prison, mais sortit au bout de trois. L’Etat du Massachusetts le poursuivit à nouveau mais sans réussir à le faire incarcérer. La nationalité américaine fut refusée à Charles Ponzi mais l’homme demeura néanmoins aux Etats-Unis. En Floride, il tenta de monter à nouveau une escroquerie de même type, mais sans succès. Il mourut pauvre en Amérique latine.

Yves Mamou

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