De pressantes nécessités convergentes
Pour le premier, Mr. Obama, cela signifiait - traduit en langage vulgaire - non seulement éviter un désaveu cuisant mais aussi un échec… à savoir obérer ou mettre une politique étrangère d’une toute autre envergure que celle du Congrès américain et de ses préoccupations terre à terre et souvent à courtes vues… principalement dictées par la soif du gain, la défense du statut et des privilèges personnels, celle du territoire politique et des intérêts partisans, ainsi que par le conformisme, l’inertie culturelle et l’obéissance servile aux lobbies [2]. Car de toute évidence Obama et certains ses conseillers, fussent-ils binationaux de cœur, regardent beaucoup plus loin que les eaux de l’Euphrate ou celles du Golfe persique.
Notamment en ce qui regarde la mise en œuvre de la “Grande stratégie planétaire” devant assurer à l’Empire Nord-américain la pérennité de son actuelle hégémonie. Vision géostratégique qui concentre désormais, et en priorité, toute son attention sur l’Asie de tous les dangers et la montée en surpuissance de la Chine… si elle ne s’effondre pas avant victime de ses propres bulles financières. Ce pourquoi, il devenait urgent – mais pas seulement – d’amorcer la stabilisation de la poudrière proche-orientale. Rude tâche parce que d’autres acteurs tentent de s’inviter à la table des Grands… telle l’Arabie forte de ses arsenaux approvisionnés par l’Amérique, qui manœuvre désormais, en Syrie et au Yémen, de concert avec l’État hébreu, toujours expert dans la conduites de discrètes et sournoises politiques d’agitation et de déstabilisation [3] !

Une “Grande stratégie de l’Empire américain” dont évidemment M. Netanyahou, fraîchement reconduit dans ses fonctions de Premier ministre, n’a cure. Celui-ci ne voit en effet pas plus loin que la culture extensive du nombrilisme obsidional caractérisant les dirigeants sionistes, ceux du Likoud en particulier. Obscur complexe prenant sa source dans le Deutéronome, les Nombres, le Livre de Josué et de la légende sanglante du Livre d’Esther, mythes fondateurs qui constituent le noyau central de la géopolitique israélite depuis des décennies [4].
La duplicité obsidionale de l’Entité sioniste
Car ce que visent les Hébreux et assimilés, ce n’est pas tant la “sécurité” d’Eretz Israël que d’asseoir et d’étendre la base arrière de leur diaspora, et ce faisant, d’avancer sous ce prétexte vers l’hégémonie régionale – voire au-delà - ceci en s’assurant de substantiels gains territoriaux ou en renvoyant les nations voisines à l’âge de pierre. À ce titre, lorsque vous lisez « Sécurité », entendez droit de suite et de conquête, liberté de développer un terrifiant armement de destruction massive sans avoir à en rendre le moindre compte à la Communauté des Nations, ni que quiconque ait droit à y redire. D’ailleurs – passe-moi la rhubarbe je te passerai le séné - le Congrès américain soutient financièrement Israël qui en retour, par le truchement de grandes fortunes binationales, assurent les campagnes électorales et les programmes politiques de leurs affidés judéo-protestants [5].
Mis en minorité au Sénat américain, le président Obama joue dans cette partie, outre les grands enjeux précités, sa propre page d’histoire : restera-t-il comme un perdant, l’homme des prodigieux échecs d’Irak et d’Afghanistan, laissant après le retrait de ses troupes des champs de ruines et le chaos de guerres sans fin ? Ou encore le promoteur honteux de nouveaux conflits - Syrie, Libye, Ukraine, Yémen - tout aussi sanglants mais dorénavant livrés par procuration, c’est-à-dire par le truchement de combattants et d’États mercenaires ?
En un mot sera-t-il au regard des générations futures un « Nobel » d’opérette, le président fantoche qui aura fait assassiner - généralement assez lâchement - toujours plus d’ennemis et de civils grâce à ses drones, ces robots volants susceptibles de frapper en tous lieux au nom de la démocratie et des droits humains ? Ces mêmes ennemis que l’on tue d’une main et que l’on soutient de l’autre tant qu’ils peuvent être d’utiles instruments… à l’instar d’al-Nosra en Syrie à propos de laquelle l’apologiste du terrorisme Laurent Fabius déclarait qu’elle « fait du bon boulot » ! Certes la morale des États ne se réduit pas à la morale des individus, mais il y a des limites à tout et il serait temps de remettre un peu d’ordre dans le droit de la guerre et le droit des gens… ou simplement à appliquer à tous, de façon équitable, les règles et lois déjà existantes. Le Tribunal pénal international n’est pas fait pour les chiens, n’est-ce pas ?
En un mot, si Barak Obama veut servir le Grand dessein américain au-delà des querelles partisanes et laisser un nom, il lui faut maintenant, dans les quelques mois qui lui restent, parvenir à stabiliser la situation au Proche-Orient, ceci en partenariat avec l’allié objectif qu’est l’Iran dans la lutte pour contenir Daech et diriger ses coups exclusivement contre les Baasistes de Damas et non contre un Kurdistan gorgé de pétrole… Un rapprochement très pragmatique qui a au final l’avantage de “neutraliser” quelque peu l’Iran vis-à-vis de la Russie et du Bloc eurasiatique. Enfin, échouer dans la négociation, c’est compromettre l’avenir politique du président Rohani, favorable à une ouverture vers l’Occident et que les « conservateurs » iraniens attendent au coin du bois au cas où il échouerait. L’on voit ici que tout milite pour les deux présidents dont les intérêts personnels et géopolitiques convergent, cherche à transformer l’essai de l’accord cadre signé à Lausanne me 31 mars 2015.
Un chemin semé d’embûches
Las, le délai de trois mois qui sépare maintenant de la signature d’un acte va être mis à profit par tous les vrais adversaires de la paix, ceux-la mêmes qui se lacèrent le visage en prédisant la fin du monde au cas où l’Iran ne serait pas soumis à une sévère mise sous tutelle. Rappelons que l’Iran ne dispose pas actuellement d’arme nucléaire, qu’il n’est pas prêt d’en avoir, qu’il lui faudrait dans le meilleur des cas de nombreux mois voire plusieurs années – après avoir procédé à des essais – pour y parvenir… Que même s’il l’a possédait elle ne lui serait d’aucune utilité offensive, mais, en vertu de l’effet de dissuasion, elle lui permettrait de sanctuariser son territoire. [6] Ce que Tel-Aviv ne veut évidemment à aucun prix, voulant conserver le monopole de la terreur nucléaire.
Les arrières cours les coulisses de la négociation qui n’est que la partie émergée de l’iceberg [7]. Il va de soi – il serait naïf de ne pas imaginer que l’accord ne recouvre pas l’ensemble des crises affectant le Croissant fertile du Liban au Kurdistan avec le gel ou la limitation des conflits en cours, exception faite du Yémen livré à l’Arabie comme un os à ronger. Les trois mois précédents la signature définitive montreront certainement l’aptitude des parties à faire baisser la tension dans cette zone à haut risque. Reste que les provocations, sous formes de méga attentats ou autres, seront immanquablement au rendez-vous d’ici le 30 juin 2015.
Léon Camus 4 avril 2015