Les supermarchés russes regorgent toujours de produits Nestlé, relève le correspondant à Moscou de la Neue Zürcher Zeitung (NZZ) dans un article du jour. Photo à l’appui, il montre que si Nestlé avait annoncé qu’il réduirait sa gamme de produits en Russie aux aliments « essentiels » comme le lait infantile, la réalité du pays est différente : les rayons sont pleins, et le choix est large.
Suite aux pluies de critiques face à la décision de Nestlé de conserver ses activités en Russie – contrairement à de nombreux grands groupes internationaux – la firme agroalimentaire suisse annonçait fin mars 2022 restreindre son activité, « désormais limitée à l’alimentation pour bébés et aux nutriments à usage médical ». Elle affirmait chercher des solutions pour son personnel et ses usines en Russie, tout en garantissant le versement des salaires de ses 7000 collaborateurs dans le pays. « La suspension de la production et de la vente de produits en Russie concerne la grande majorité des produits, y compris l’alimentation animale, le café et les confiseries », déclarait-elle le 23 mars 2022.
Nestlé défend sa présence en Russie
Cible d’une intense campagne d’appel au boycott sur les réseaux sociaux, la multinationale veveysanne se refuse à quitter le pays. Dans un communiqué, elle se défend de vouloir y rester pour des motifs économiques
Image d’illustration : le logo de la multinationale sur l’un de ses sites suisses de
Depuis plusieurs jours, la pression est maximale sur Nestlé, qui a décidé de maintenir des opérations minimales en Russie, en dépit des appels au retrait d’un pays qui a envahi son voisin ukrainien le 24 février dernier.
Sommée de donner des précisions sur les activités maintenues sur place, la multinationale veveysanne indique dans un communiqué publié mercredi que celles-ci se concentreront sur « la fourniture d’aliments essentiels, tels que les aliments pour nourrissons et la nutrition médicale/hospitalière, et non sur la réalisation de bénéfices ».
Critiques ukrainiennes
Lors d’une prise de parole à distance, samedi dernier à l’occasion d’une manifestation de soutien organisée à Berne, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a pointé du doigt le géant de l’agroalimentaire. Sur les réseaux sociaux, les appels au boycott se multiplient depuis des jours – logo d’entreprise maculé de sang à l’appui –, arguant notamment qu’en restant actif à Moscou ou à Saint-Pétersbourg le groupe suisse participe au financement de la guerre de Vladimir Poutine, via la fiscalité.
En sortant de son silence, Nestlé semble surtout vouloir dissiper cette critique : « Bien que nous ne prévoyions pas de faire des bénéfices dans le pays ou de payer des impôts connexes dans un avenir prévisible en Russie, tout bénéfice sera versé à des organisations à but non-lucratif », précise-t-elle, assurant également avoir déjà apporté « des centaines de tonnes de denrées alimentaires et une aide financière importante pour soutenir la population ukrainienne et les réfugiés dans les pays voisins ».
Investissements stoppés
Pourquoi s’entêter à rester alors que bien d’autres ont choisi de s’en aller ? « Cette approche est conforme à notre objectif et à nos valeurs, répond la principale intéressée dans sa prise de position. Elle respecte le principe de garantir le droit fondamental à l’alimentation. »
A l’avenir, des marques renommées telles que KitKat et Nesquik, entre autres, seront toutefois suspendues. Les importations et exportations jugées non essentielles à destination et en provenance de la Russie, la publicité et les investissements dans ce pays ont été interrompus, selon la multinationale, qui assure encore qu’elle se conformera pleinement à toutes les sanctions internationales contre le pays.
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Pour l’instant, aucune mesure n’a été prise en ce sens par l’Union européenne, les Etats-Unis ou la Suisse. A l’instar de Burger King, Danone, Unilever ou Roche, d’autres sociétés ont elles aussi décidé de garder un certain niveau d’activité dans le pays. Tout comme Novartis. Le groupe rhénan a toutefois décidé hier de modérer ses activités de recherche.
Début mars, Nestlé avait indiqué à AWP compter plus de 7000 employés en Russie ainsi que six usines et y avoir réalisé 1,7 milliard de francs de ventes l’an dernier, sur un chiffre d’affaires total de 87,1 milliards. Le groupe possède également trois sites en Ukraine, grenier à céréales du monde, sur lesquels 5800 employés opèrent.
Extrêmement présente sur la place publique, la polémique a d’abord semblé peu émouvoir les investisseurs, à l’exception de l’association activiste Actares, qui milite pour un actionnariat responsable. En début de semaine, celle-ci a appelé Nestlé à faire la lumière sur ses intentions. Depuis mardi, l’action est en recul. A la clôture, mercredi, le titre perdait 1,61%.