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Les Rothschild et la militarisation des investissements

samedi 15 novembre 2025

Paris, 14 octobre 2025 – Comme annoncé le 20 mars dernier lors de l’événement sur le Financement de la Base Industrielle et Technologique de Défense (BITD organisé par le ministère de l’Économie, des Finances, de la Souveraineté industrielle et numérique et le ministère des Armées, Bpifrance élargit aujourd’hui sa gamme de solutions d’investissement à destination des particuliers en lançant le fonds Bpifrance Défense S.L.P. (« Bpifrance Défense »). Bpifrance renforce ainsi son soutien aux entreprises du secteur de la défense. D’une taille cible de 450 millions d’euros et accessible aux particuliers à partir de 500 euros, ce fonds permettra à ceux qui le souhaitent, d’investir notamment dans des start-ups, des PME et des ETI de la BITD.
L’ancien directeur de France Trésor et l’actuel secrétaire général de l’Élysée, Emmanuel Moulin, avait lancé dès 2024, le fléchage de l’épargne des particuliers dans le domaine de la défense.
De plus, l’armée française va lancer un fond de capital risque doté de 200 millions d’euros. Les deux fonds sont financés par le ministère des Armées et mis en œuvre conjointement avec Bpifrance.
Le lobby financier européen Keen Venture Partners a dicté la nouvelle voie du financement de la défense européenne « Pour construire un écosystème solide dans la tech défense, le capital-risque est indispensable afin d’industrialiser rapidement les solutions et d’ancrer leur impact dans la durée. »
Cette capitalisation risquée se fera au travers de Start Up, dans lesquelles les entreprises et les particuliers pourront investir.
Demander à notre écosystème de financer la guerre qui est à l’origine de notre faillite est un piège. Notre tissu économique est réduit à une peau de chagrin. Le scénario catastrophe sera de forcer les épargnants à placer leur économie dans des fonds de défense pour obtenir une rentabilité importante.
Cette bulle spéculative financière du domaine de la défense sera alimentée par une nouvelle guerre que veulent les fascistes de Bruxelles et les financiers qui tirent déjà profit des revenus de l’armement dans la guerre en Ukraine et au Moyen Orient.
Les trois acteurs principaux sont, l’OTAN, Bruxelles, et Rothschild.
Tumulus Defense, une division de Rothschild Defense Manufacturing, a remporté le prestigieux contrat commercial et gouvernemental de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN).
Selon le cabinet d’études financières Rothschild & Co. Redburn, les entreprises européennes du secteur de la défense pourraient voir leurs revenus provenant de leurs clients européens augmenter en moyenne de 10,5 % à 11,5 % par an au cours de la prochaine décennie, la plupart des pays s’étant engagés à respecter les objectifs de dépenses fixés par l’OTAN pour 2035.

« Si vous ne vous occupez pas de géopolitique, la géopolitique s’occupera de vous. » Rothschild e-banking, Stratégie d’investissement 10/09/2025

Cette formule, attribuée à l’ancien conseiller du président Carter, Zbigniew Brzeziński, semblait depuis longtemps hors de propos dans une Europe qui se considère comme « post-historique », pacifique et économiquement intégrée. Mais la réalité s’est effondrée au cours des derniers mois, avec le retour de la guerre aux portes de l’Union et la nécessité d’un réveil stratégique. L’Europe redécouvre une vérité oubliée : si elle est incapable de se défendre, elle n’aura ni souveraineté politique ni indépendance économique. La défense est le fondement qui détermine tous les autres éléments fondamentaux.

Défense, retour à la réalité et souveraineté naissante

La guerre en Ukraine a mis fin à une illusion stratégique de longue date. En quelques semaines, l’Europe a découvert à quel point elle était vulnérable, avec des capacités militaires dispersées, des stocks d’armes insuffisants et une dépendance critique vis-à-vis du parapluie américain. Ces faiblesses illustrent une perte d’autonomie qui sape notre souveraineté.

Le réveil est brutal, mais salutaire. Le programme budgétaire militaire s’étend sur le long terme, mais les intentions nationales ont déjà commencé à augmenter de manière spectaculaire. La France parle de 3,5 % de son PIB à l’avenir, tandis que la Pologne approchera les 5 % d’ici 2025. L’Allemagne dispose du plus gros budget de défense de l’UE depuis 2024 et le pays a annoncé 500 milliards d’euros de dépenses militaires supplémentaires sur dix ans.

La question de l’allocation des budgets à l’équipement sera centrale. La base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE), très fragmentée, devra être structurée et des acteurs ayant une masse critique devront être mis en place afin de concurrencer les grands fournisseurs américains. Dans le cadre de ces efforts, nous avons découvert un allié inattendu : le nouveau président des États-Unis d’Amérique. Dans une interview accordée au Figaro en mai, Ariane de Rothschild a souligné que « Donald Trump rend un grand service à l’Europe en la sortant de sa léthargie ». En menaçant de se retirer de l’OTAN, le président américain incite l’Europe à agir, comme le montrent les performances boursières des entreprises européennes de défense par rapport à leurs homologues américaines. Le ton politique a changé. L’autonomie stratégique est un objectif clairement affiché. Et le débat public a reconnu une évidence : sans défense crédible, l’Europe ne jouira ni de souveraineté politique ni de souveraineté économique.

Dans cette optique, il est tout à fait dans l’intérêt des investisseurs de réintégrer la défense dans leurs analyses stratégiques. La stabilité géopolitique est une condition préalable à une performance durable. Sans sécurité, pas d’investissement à long terme.

Le rapport Draghi : investir pour la souveraineté économique

Dans son rapport remis à la Commission européenne en septembre 2024, Mario Draghi, économiste et ancien président de la BCE, propose rien moins qu’un changement de paradigme. Face à l’érosion de la compétitivité européenne, il plaide pour un bond collectif sous la forme d’une stratégie d’investissement coordonnée à grande échelle axée sur la souveraineté. Il prône une Europe qui assume pleinement son rôle d’acteur économique à part entière, capable de rivaliser avec les États-Unis et la Chine.

Cette ambition repose sur trois piliers :

— Énergie : l’Europe doit garantir une énergie propre, compétitive et indépendante. Cela implique les énergies renouvelables, le retour du nucléaire (conventionnel et SMR, petit réacteur modulaire), des réseaux électriques plus denses permettant l’électrification industrielle et l’utilisation du gaz naturel liquéfié pour compenser la perte du gaz russe. L’autosuffisance énergétique est une condition préalable à une industrie compétitive et résiliente.
— Innovation : le défi majeur ici est la productivité. À partir de 2040, l’Union européenne perdra deux millions de travailleurs par an. Elle devra produire plus avec moins de travailleurs et, pour ce faire, elle devra maîtriser les technologies critiques (IA, biotechnologies, espace, semi-conducteurs) et restaurer sa capacité d’innovation.
— Financement : l’Europe dispose d’une épargne abondante mais mal répartie. Mario Draghi appelle à la création d’une « Union de l’épargne et de l’investissement » (UEI) afin de mobiliser cette épargne pour financer notre souveraineté, notamment grâce à la modernisation des marchés de capitaux et à une véritable union bancaire (voir article précédent), car le secteur bancaire européen est aujourd’hui excessivement fragmenté.

Mais sans sécurité, ces piliers restent fragiles. Chaînes de valeur critiques, infrastructures énergétiques, laboratoires, usines : tous ces éléments essentiels reposent sur une base géopolitique stable. La défense n’est pas une priorité parmi d’autres, c’est le facteur stratégique vital qui sous-tend l’ensemble.

Pour les investisseurs, une transformation à saisir dès aujourd’hui

Longtemps considéré comme un tabou pour l’investissement, le secteur de la défense est désormais un thème de gestion accepté, soutenu par les gouvernements, l’industrie et les institutions européennes. Les budgets augmentent rapidement, les outils et les ressources européens se multiplient (notamment le Fonds européen de défense) et une volonté franche se dessine de consolider une base industrielle et technologique européenne intégrée dans le domaine de la défense.
Mais cette dynamique n’en est qu’à ses débuts. Les capitaux publics ne suffiront pas. Le rapport Draghi appelle à un effort conjoint dans lequel les investisseurs privés joueront un rôle stratégique dans le financement de la transformation du continent. La défense est un élément majeur de cette transition, mais elle n’est pas l’horizon.
La souveraineté européenne se jouera également sur le front économique, à travers l’énergie, l’innovation et le financement. Un investissement raisonné dans la souveraineté ne doit pas se limiter à un seul secteur, avec les conséquences que cela implique en termes de volatilité. En investissant dans les piliers économiques du rapport Draghi, les acteurs privés peuvent tirer parti d’une transformation fondamentale tout en diversifiant leur exposition à un thème transversal et durable : la souveraineté.

Investir dans la souveraineté européenne, c’est saisir un mouvement profond qui génère des performances financières grâce au réarmement, à la reconstruction énergétique, à la réindustrialisation et aux innovations critiques, sans oublier le financement de ces investissements. Ces dynamiques ne sont pas éphémères ; ce sont des thèmes à long terme défendus par des acteurs stratégiques européens. Au-delà des rendements financiers, il s’agit également d’un engagement non financier. Ce thème incarne la responsabilité de contribuer à la reconstruction de notre maison commune et à l’autonomie de nos décisions collectives. Il s’agit tout simplement de notre liberté. Comme l’a dit Jean Monnet, « les hommes n’acceptent le changement que dans la nécessité, et ne voient la nécessité que dans la crise ». Le moment est venu de faire un choix.

Anthony PenelGestionnaire de portefeuille Actions européennes,Edmond de Rothschild Asset Management

Caroline GauthierCo-responsable Actions,Edmond de Rothschild Asset Management

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