M. Lecornu écarte un appel d’offres européen pour la future capacité de frappe dans la profondeur de l’armée de Terre
Lors d’une récente audition à l’Assemblée nationale, le Délégué général pour l’armement [DGA], Emmanuel Chiva, a expliqué que deux solutions étaient envisagées pour moderniser la capacité de frappe dans la profondeur de l’armée de Terre, pour laquelle 600 millions d’euros seront investis dans le cadre de la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30.
« Nous aurons deux solutions : une première qui consisterait à prendre sur étagère le HIMARS américain », qui a l’avantage d’être sur le marché mais qui « introduit un risque de dépendance », ou de « développer une solution souveraine nationale ou européenne » étant donné que « nous avons, dans notre Base industrielle et technologique de défense [BITD] des compétences qui existent dans ce domaine ». Et d’évoquer des discussions en cours entre la Direction générale de l’armement [DGA] et plusieurs industriels, dont MBDA, Ariane et Safran.
Cela étant, le 7 juin, au moment d’aborder cette question lors d’une audition au Sénat du ministre des Armées Sébastien Lecornu, le sénateur Cédric Perrin a fait état état de « bruits » selon lesquels la DGA serait sur le point de lancer un « appel d’offres européen », ce qui « mettrait de côté une solution souveraine ». Et d’insister : « Ce n’est pas des ‘on-dit’ ».
Seulement, il n’y a pas pléthore de solutions européennes en matière de capacités de frappe dans la profondeur… Et quand elles existent, elles sont portées par des industriels allemands, dans le cadre de partenariats noués avec des acteurs ne faisant pas partie de l’Union européenne.
Ainsi, Krauss-Maffei Wegmann a signé un accord avec l’israélien Elbit Systems autour du système Euro-PULS et Rheinmetall en a fait autant avec Lockheed-Martin, en vue de proposer une version allemande du M142 HIMARS [High Mobility Artillery Rocket System].
« Il n’y a pas de fumée sans feu », dit-on cependant… Toujours est-il que M. Lecornu a démenti tout projet d’appel d’offres européen pour le remplacement des Lance-roquettes unitaires [LRU], mis en œuvre par le 1er Régiment d’Artillerie [RA].
« Le principe doit être une solution souveraine et s’il y a exception, ce serait pour des raisons opérationnelles. Et donc, il ne faut pas se raconter d’histoires : ce sera le HIMARS américain et pas autre chose. Donc, il n’y aura pas d’appel d’offres européen », a en effet assuré le ministre.
« Je forme le voeu pour qu’on puisse avoir une solution souveraine et j’ai demandé à la DGA d’objectiver le coût, les délais, le modèle à l’export et les spécificités militaires [car] s’agira-t-il d’un ‘HIMARS français’ ou un peu autre chose ? », a enchaîné M. Lecornu.
Visiblement, le facteur déterminant sera le délai entre le lancement du programme et sa concrétisation. « Il y aurait de la fierté [chez nos artilleurs] à avoir un dispositif français mais, en même temps, si on leur dit qu’il arrivera dans dix ans, on aura un problème », a fait valoir le ministre.
Mais au-delà de cet aspect, il faudra impérativement trouver un successeur au LRU avant 2028 étant donné que celui-ci arrivera au bout de son potentiel à cette échéance. Sera-t-il possible de développer et de tester un solution souveraine en moins de cinq ans ? « Il faudra assumer une prise de risque », a soutenu M. Lecornu.
Pour rappel, la LPM 2024-30 prévoit de doter l’armée de Terre « d’au moins 13 systèmes » de frappe à longue portée d’ici 2030.